L'eau, source de vie
Ici, nous attendons les premières pluies qui viendront adoucir la chaleur écrasante du mois d’avril et de mai. Des pics de 48 avec des moyennes de 45 degrés viennent nous envelopper dans un manteau chaud, lourd et étouffant. Certainement que c’est pour les mangues que le soleil s’impose ainsi à cette période. Il se donne afin qu’elles achèvent leur maturation, parfait leur teinte et assure une chair tendre et sucrée, fondant au palais. Et pour tous ceux qui ont des manguiers, à l’ombre desquels se reposer , c’est un véritable régal. La nuit, les chambres sont désertées. On sort les matelas et les nattes, pour dormir en famille sous les étoiles, étendus et affalés dans la fournaise que redonne les murs des villes, véritables capteurs de chaleur. Le canari est à proximité : boire, boire et boire ! Se désaltérer et s’abreuver devient vital, plus que d’habitude. De l’eau ! Mais où est l’eau ? Les barrages sont à sec et les coupures de courant sont quasi permanentes en ce mois de mai. Il faut se lever à 3 heures du matin et remplir les barriques et les canaris pour faire des réserves. Pour ceux qui n’ont pas l’eau à domicile, une attente aux fontaines publiques de plusieurs heures pour ce bien si précieux devient longue et pénible. S’alignent alors les bidons, les gamelles et les seaux sur des centaines de mètres. Récemment, nous avons subi une semaine de coupure totale, l’Office national des eaux ravitaillant les populations avec des citernes mobiles. Les nappes phréatiques sont affaiblies et les barrages, à secs. Le comble de cette pénurie nous a saisis encore récemment. Le marché central de Ougadougou abritant plus de 5000 vendeurs, situé pourtant à une centaine de mètres des sapeurs-pompiers, a vu plus d’un quart de sa surface brûlée ! Les pompiers, impuissants, n’avaient pas d’eau pour maîtriser le feu qui s’y était déclenché.
| Canari : pot en terre destiné à conserver l'eau |
Mais bientôt, il va pleuvoir. Et la température redescendra de quelques degrés pour devenir plus supportable. On quittera la saison sèche pour entrer dans la saison des pluies. Nous l’espérons ! Tout ce qui vit l’espère ! Les hommes, les enfants, les vieillards, le bétail (…),tout simplement pour vivre, se nourrir, se soigner, se laver . Les activités humaines aussi ont besoin d’eau. L’électricité fonctionne au fuel. Les machines ont besoin d’eau avec laquelle on les arrose pour refroidir. Les pannes d’électricité, qui en résultent sont catastrophiques pour la vie économique et sociale que ce soit par exemple pour les dispensaires ou les entreprises qui ne disposent pas de groupe électrogène. Les opérateurs économiques s’en trouvent fortement ralentis sinon bloqués dans leurs travaux. Les entrepreneurs voient leurs chantiers stoppés. Pour construire, il faut de l’eau que ce soit pour fabriquer les briques en banco ou les immeubles en béton ! Comment travailler sur son ordinateur, faire fonctionner ses machines ou encore vendre du poisson alors qu’il a subi plusieurs décongélations. Mais il faut se dire la vérité, le mois de mai n’est pas un bon mois pour consommer du poisson !
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La terre aussi exige son du pour qu’elle accepte que l’homme la travaille et reste conciliante aux semences qu’il mettra en elle pour nourrir les siens. Elle, aussi, doit boire. La pluie est vitale pour que cette terre n’ait pas le cœur dur, qu’elle ne soit pas froissée et craquelée sous le poids sec du soleil. Mais cette pluie doit venir dans la paix, sans violence. Si elle est en colère, elle peut détruire le travail des hommes, noyer ses semences, abattre ses récoltes, détruire ses maisons. A l’heure de la saison pluvieuse, la pluie devient la véritable maîtresse de la configuration de la terre. Elle peut en quelques minutes ou quelques heures effacer de longues heures de labeur, inondant les champs. Les graines fraîchement semées par les paysans, le dos courbé et la daba à la main, n’ont pas eu le temps de s’enraciner et sont noyées. Les pistes se transforment, il faut être vigilants. Les crevasses se dispersent et des cratères apparaissent. C’est alors la pluie qui maîtrise les travaux publics. Vigilance, persévérance et espérance sont du quotidien des Burkinabé ….
| la daba : houe traditionnelle |
Alors en attendant que l’eau s’offre à nous,
que chacun ne gâche pas ce trésor vital !